Archives du blog

vendredi 2 mai 2008

38 et 39e étape - Santo Domingo - Burgos (Castille)





38 - Santo Domingo de la Calzada – Belorado – Villafranca
Rioja - Castille



Les nuages incarnent
les rayons du soleil
sous forme de coquille

Vision étonnante mais bien réelle ! On voit ce que l'on veut dans le ciel. A une autre époque, cela aurait été considéré comme une apparition !


Seul
un glaneur de patates
et d'immensité












Dans le vent
les pailles rases
frottent leurs ailes de cigale

Jamais vu le moindre oiseau
au cabaret des oiseaux !

Entre goudron et chaumes
que vous êtes belles
fleurs sauvages des fossés !

Même les rapaces
ont déserté ces terres
où il n'y a rien à croûter
Le mulot court
à l'ermitage
de ses trésors




Plus que le Matamore
me plaisent
les cigognes d'église
cloches vivantes et pèlerines






Les paysans et leurs machines
ont vaincu
J'entends le glas de la nature


Les châteaux de paille
sont moins dépenaillés
que les villages




39 - Villafranca – San Juan de Ortega – Atapuerca – Burgos
Castille


Chaque matin
la flèche de mon ombre
pour indiquer la voie


Sur le mont des chênes
et des bruyères bleues
la trace –rare- des combats

Après Villafranca (ville des Francs), belle étape sur un plateau à 1000 mètres d'altitude, les Montes de Oca. Il est couvert de landes de bruyère, de chênes et de pins. Au Moyen Âge, les pèlerins redoutaient ce passage à cause des bandits et des loups. Ce lieu désert fut aussi un lieu de carnage pendant la guerre civile espagnole. En effet, une trentaine de villageois furent fusillés ici par les franquistes en représailles. Un monument républicain, toujours fleuri, rappelle ce tragique événement.



Il en fallut des saints
armés de miracles et de reliques
pour croiser les masses de l'Europe
sur la terre espagnole

Le saint n'a pas voulu
de son tombeau de luxe,
- humble jusqu'à la fin

Niché dans une ondulation du plateau, le monastère de San Juan de Ortega (Saint-Jean-des-Orties) est un enchantement. Ce petit bijou a été fondé vers 1150 par un de ces saints architectes, bâtisseurs de ponts et d'églises. Le saint, modeste, n'a pas voulu du somptueux tombeau qu'un noble comte lui avait fait construire. Quand j'y passe, une chorale autrichienne prie avec de merveilleux cantiques. Comme en de nombreux lieux de culte, depuis Stonehenge et Abou Simbel, le site est relié à des phénomènes solaires. A l'équinoxe de printemps et d'automne, un rayon de soleil illumine le chapiteau de la Nativité.


Des cantiques tyroliens
déposent un peu de ciel
sur les pierres du monastère

Ils sont venus pour l'équinoxe
quand le soleil illumine
le chapiteau de la Nativité
"a la cinco de las tardes"

Qui protége l'un de l'autre,
le monastère ou la forêt ?
-les inséparables
Cette forêt
est un cloître de pins roses
où il fait bon chanter

Pas de frontière entre le monastère et la forêt. Celle-ci prolonge celui-là. La déambulation du pèlerin est similaire à celle du moine dans un cloître, mais elle se fait à l'échelle cosmique. Je marche en chantant mon plaisir d'être au monde. Contrairement à ce que disent les grincheux, même si le ciel est vide, le monde n'est pas désenchanté. Pas de sentiment d'étrangeté quand on a deux jambes pour marcher ce que la tête a rêvé. Le monde est à moi, et je suis là, tout entier à cette nature et à cette humanité.

Villages du plateau
tapis dans les creux
- pas une tête ne dépasse
quand le clocher de l'église
peigne les cheveux du vent

(Agès – Villaval)




De sa caverne
l'homme d'Atapuerca
éclaire la marche de l'humanité

Atapuerca, près de Burgos, est un site archéologique, classé au patrimoine mondial de l'humanité par l'Unesco. Encore une belle surprise du Chemin ! Les grottes de la Sierra d'Atapuerca contiennent de riches vestiges des premiers humains à s'installer en Europe de l'Ouest il y 1,2 million d'années. Elles ont apporté des renseignements importants pour l'histoire de l'évolution de l'homme : découverte d'une nouvelle espèce, l'Homo antecessor, un ancêtre possible des Néandertaliens, et premières traces de cannibalisme. Un parc archéologique présente ces découvertes.




Atapuerca la cannibale
est dépassée
par son passé
Vue de la Sierra
la ville si proche
est encore à cinq heures de marche !




Au loin, Burgos apparaît, perdue au milieu des vastes terres agricoles de Castille. Mais l'entrée en ville est un enfer pour le marcheur : longue périphérie urbaine, huit kilomètres d'une interminable avenue rectiligne pour arriver au centre-ville. La rencontre de pèlerins québécois, qui deviendront des amis, permettra de surmonter ce désagrément.

La cité hésite
entre son vieux Cid matamore
et sa folle cathédrale

Burgos est la ville du fameux Rodrigue, surnommé le Cid Campeador par les musulmans qui, dit-on, le redoutaient. Cid vient de sidi, caïd, seigneur, en arabe. Ville de la démesure, Burgos est aussi dominée par une excessive cathédrale gothique dont la richesse monumentale m'a fait fuir.


Trop de richesse et de marbres
trop de tombeaux et de retables
trop d'art dans ce temple
qui ne sait plus sa religion


On ne peut imaginer
Rodrigue et Chimène
vieux et morts

Hommage aux amants castillans immortalisés par Corneille. Leurs restes reposent côte à côte dans la cathédrale de Burgos, sous une dalle de marbre. Comme Roméo et Juliette, ils représentent l'image éternellement jeune de la fougue et de la fièvre amoureuse.







Sur la place
le pèlerin nu et fatigué
comme une Vanité

(Burgos)






Cette ville du désert
- Las Vegas jacquaire -
est l'enfer du pèlerin

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Blog très sympa!

Anonyme a dit…

Je savais l'engouement pour le chemin de Compostelle, mais j'ignorais que même les cigognes cédaient à l'appel du Saint.
Mais j'en connais qui préfèrent pour leur migration emprunter le GR5.
Anonyme