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lundi 25 février 2008

30e étape, Ruesta






30 - Arrès – Artieda – Ruesta
(Aragon)




La mouche sous la pluie
elle vole
entre les gouttes


Trempé jusqu'à la ceinture
je grelotte
sous cape

Plateaux robines villages perchés
bergeries de pierres sèches
Beauté rude des hautes terres

Dénuement, austérité, solitude : Aragon et Provence d'en haut sont cousines. Mêmes marnes noires, mêmes plateaux, mêmes cabanes et bergeries en pierres sèches, mêmes villages abandonnés. Ici je me sens un peu chez moi (villages perchés de Mianos –Artieda).


Un ange de désolation
- noyant les terres -
a chassé les habitants

(Ruesta)




Les maisons crevées
- cases sans fond d'un damier -
où les vies sont tombées





Malgré l'auberge rouge
le village mort ne s'est pas relevé
Fresques anarchistes sur l'église abandonnée

Il n'y avait que l'Espagne pour inventer Ruesta l'extravagante. Imaginez la surprise : une auberge de pèlerins pour Saint-Jacques-de-Compostelle, restaurée et gérée par la CGT, une auberge rouge ! Tolérance ou opportunisme ? Comment expliquer une telle ironie de l'histoire ? Ruesta, aujourd'hui en ruines, fut un village prospère qui eut jusqu'à mille habitants. Dans les années 1960, la construction d'un barrage noya les terres et contraignit les paysans à l'exil. Le village fut abandonné. Pour lutter contre la désertification des campagnes, la CGT espagnole racheta et reconstruisit quelques maisons pour en faire un centre de formation et d'accueil. Mais son exemple ne fut pas suivi, personne d'autres ne vint participer à la restauration du village. Comme il se trouve aujourd'hui sur le Camino, et vu l'essor du pèlerinage, la CGT, réaliste, accueille volontiers les pèlerins de passage, rentabilisation oblige !



Les ruines sont plus mortes
quand elles sont habitées


Les vieillards de l'Apocalypse
ce pays les a eus
un moment au pouvoir

Ces vieillards de l'Apocalypse, si souvent représentés sur les tympans des église romanes, le vieux dictateur Franco, accroché au pouvoir jusqu'à sa fin dernière, n'en fut-il pas une effrayante illustration dans l'histoire de l'Espagne ? L'éternité relative du Camino ne doit pas faire oublier l'histoire.

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